Les protéger…

J’ai été victime d’abus sexuels enfant. Une seule fois. Par un ami de la famille. Je n’ai pas été violée. J’avais un peu moins de dix ans, je crois. Cela m’a longtemps pourri la vie.

Je me suis longtemps sentie coupable de ce qu’il m’était arrivé. Sale aussi.
Je me suis abîmée physiquement, tombant dans l’obésité et le côté garçon manqué pour ne plus attirer les regards.

J’ai mis des années à en parler. Je ne l’ai annoncé à mes parents qu’après mes 18 ans. Leurs réactions n’ont pas été à la hauteur de ce que j’aurais attendu, je ne m’en rends compte que maintenant.
Certes, ils ont été choqués, outrés. Mais à aucun moment ils ne m’ont dit qu’ils étaient désolés et en colère. Que je n’étais pas coupable. Qu’ils me soutiendraient quoi que je fasse.

Non, ils se sont contentés de confronter mon agresseur et de me demander de ne pas faire de vagues (entendez : ne pas porter plainte) et de passer à autre chose.

À l’époque, je n’ai pas vu à quel point ce point de vue que j’ai suivi étais malsain. Je m’en suis indignée que bien des années plus tard, quand il était trop tard pour porter plainte.

Depuis, je vis avec cette boule au cœur, ce regret de n’avoir pas porté plainte, que mon agresseur s’en soit si bien sorti, au risque d’avoir recommencé, et, du coup, d’en être quelque part coupable.

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C’est un fait qui me touche encore plus depuis que je suis mère. J’ai tant de peur que la même chose arrive à mes enfants, sachant qu’il y a au moins 25 000 cas de viols en France chaque année (une femme violée toutes les deux heures) et que 45,9%% des victimes sont des enfants, au moment de l’agression.

Sachant également qu’en Europe, 1 enfant sur 5 serait victime d’abus sexuels (chiffre apparemment sous-estimé) et que dans 70 à 85%% des cas, l’auteur des violences est quelqu’un que la victime connaît et en qui elle a confiance.

J’ai peur de passer à côté si cela leur arrive. Je ne sais que trop combien il est facile de cacher de telles horreurs à des adultes et les dégâts que cela fait, physiquement et moralement.

Mon grand va avoir 7 ans. Presque l’âge que j’avais en ce jour funeste.
Sctroumpfette approche de ses 6 ans…
Et pourtant je n’ai toujours pas trouvé les mots pour parler de cela avec mes enfants. De les avertir. De leur dire qu’ils doivent sans peur et sans reproche m’en parlé si jamais le pire arrive.

J’ai peur de leur faire peur. De briser leur innocence. De les emmener à se méfier de tout le monde.

Il y a peu, lors d’une fête en famille, certains gestes de mon beau-père envers ma fille m’ont mis mal à l’aise. J’en ai parlé le soir même avec Père Charmant. Et avec le recul, je me demande si je n’ai pas vu le mal là où il n’y en a pas.
Je scrute chaque geste de chaque homme qui s’approche de mes enfants, et surtout de ma fille. Peut-être trop, au risque de voir des choses qui n’existent pas.
Nous n’en avons rien dit à mon beau-père. Il n’a jamais été seul avec mes enfants depuis leurs naissances et je n’ai jamais plus ressenti cette gêne depuis ce jour… Ce qui tend à me prouver que j’ai été trop dans « mes délires ».

Je ne sais comment prévenir mes enfants du danger qui les guettent. Comment les aider à l’éviter. Et surtout à le gérer si jamais ma veille n’était pas assez efficace.

Je sais que je ne pourrais pas les protéger de tout. Que je ne serais pas toujours là. Et cela me fait peur. Une peur à en crever. À en faire des cauchemars chaque nuit…

Sources : SOS femmes Accueil
Les supers parents

15 commentaires sur “Les protéger…”

  1. Je te comprends…
    Il ne m’est jamais rien arrivé de tel, mais je flippe pour tout. Depuis que je suis devenue maman je ne cesse d’y penser. Et si ???
    Je pense que j’en parlerai à mon bonhomme. J’ai peur à un point, c’est fou…

    1. Je crois que tout parents flippe de ça, en fait. Encore plus quand on l’a subit. Mais ça et la peur de l’accident, je crois que tout le monde y a le droit

  2. je suis tellement désolée de ce qui s’est passé, tellement navré que tes parents n’aient pu t’apporter le réconfort attendu.
    Ma fille a 10ans, elle a lu le guide sexuel du zizi de titeuf et ensuite doucement avec les “mots” de titeuf et un peu de son humour je lui ai parlé de cela, lui disant que quiconque la touche elle devait me le dire, que ce soit papa, un tonton, un cousin, un copain, un inconnu….que personne n’avait le droit de lui faire de mal ou de la toucher à certains endroits, et que surtout elle ne devait jamais me mentir ou me cacher la vérité et que dans ce cas je pourrai la protéger et la défendre. Je suis la guerriére de ma (de mes) filles, Trinity le sait, je suis SA guerrière

    1. Dernièrement, un jeu a eu lieu au CP. Se touchait le zizi. Mon fils m’en a parlé. On lui a expliqué que non, ce n’était pas un jeu, que personne, personne (pas même papa, maman ou un médecin) n’avait le droit de le toucher sans son consentement et encore moins à ce niveau là. Que chez les enfants, c’était même interdit par la loi et qu’on peut aller en prison.
      J’y ai pensé, au Guide du zizi sexuel, mais ils sont encore petits pour le lire…

  3. Les gestes “bizarres” j’ai connu, je me suis sentie vite mal à l’aise, je savais que ce n’était pas normal. Brrrrr!! Mes parents ont tout de suite été au courant. Je ne sais pas comment je serais avec ma fille mais c’est sur que je la mettrais en garde…Peut être que tes parents ont réagit comme ça car ils ne savaient pas réagir autrement :-/
    Biz
    Aurélie

    1. Je n’en veux pas à mes parents, effectivement, ils ont fait du mieux qu’ils croyaient. Mais clairement, avec le recul et tout ce qui a pu se passer depuis, je sais aussi qu’ils ont voulus surtout éviter un scandale et les complications qui vont avec. C’est là que j’ai encore un peu de rancoeur.
      Mais bon…

  4. Je comprends que ce que tu peux vivre, surtout si tu es passée par là. On se méfie beaucoup nous aussi et dernièrement, mon mari m’a dit qu’il n’aimait pas la façon dont notre fille faisait des câlins à son parrain et qu’il voulait y mettre un terme. Je n’y avais pas fait attention moi-même mais j’ai pris en compte son mal-être et nous avons expliqué à notre fille que les câlins ne se faisaient qu’en famille: papa, maman, son frère, éventuellement les mamies. Les autres ont droit à un bisou mais pas plus. Elle n’a que 3 ans et demi, on peaufinera quand elle sera plus grande. 🙂

    1. Schtroumpfette doit être un peu pareille que ta fille. Elle est très tactile, se colle aux gens, les caresse. Limite intrusive, en fait, mais ça va avec sa pathologie et on galère à lui faire perdre cette manie.
      Mais c’est clair qu’on se pose souvent des question

  5. j’ai connu ca, quelqu un de tres proche qui a abusee de moi pendant des années, pour echapper a “ca”, je suis partie, j en ai parlé a mon conjoint. Par la suite mon conjoint me battait et se servais de mon histoire pour me faire chanter de tt raconter.
    je suis -enfin- partie, et j ai tout dis.
    le proces est en cours,
    je comprends tes parents, je comprends ce que tu ressens
    mon fils n a que 3 ans mais je lui parle qu il n y a que lui qui a droit de toucher a son zizi de le laver, et que si il veux pas il faut crier tres fort, que si quelque chose etait bizare fallait venir me le dire je ne le punirais pas.

  6. J’avais comme toi pas envie de briser leur innocence mais l’environnement a fait qu’il a finalement fallu que j’en parle à ma fille, et ça s’est finalement plutôt bien passé, elle avait déjà compris qu’il fallait se méfier de gens méchants, elle y a rajouté une case “malades qui ne se voient pas”… Le livre “jai peur du monsieur” m’ a bien aidée…

  7. Pas évident d’aborder le sujet avec les enfants. Je pense que j’essaierai de leur en parler même si c’est délicat, de leur dire qu’aucun adulte n’a le droit de leur faire ses choses là. C’est quelque chose qui me fait peur aussi. On n’est à l’abri de rien malheureusement. C’est triste de se dire que l’on doit se méfier de beaucoup de personnes, même de notre entourage … 🙁

  8. pffffffffff je comprends tellement ton sentiment.
    Moi c’est ma grande sœur qui a subit bien plus que toi, et ça nous a tous marqué.
    Elle a vécu dans le mensonge très longtemps et tout a éclaté quand j’avais 19 ans et elle 25 ans !
    Ca chamboule tout et c’est dur de s’en remettre même lorsque tu n’es pas toi même la victime.
    Aujourd’hui, je suis comme toi, je vois le mal partout, ma grande à 9 ans, et j’en ai mal au trippe d’imaginer qu’elle puisse subir une telle chose.
    C’est pas facile d’arriver à protéger nos enfants sans leur transmettre notre stress.

  9. On peut enseigner aux enfants comment réagir sans même parler de sexualité. Il y a cette vieille vidéo vintage qui en parle : http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=tLzj3CstC7o

    En gros, on peut enseigner à nos enfants que leurs sensations ont toujours raison et que s’ils se sentent pas à l’aise, ils peuvent se défendre, dire que ça ne leur plait pas, s’enfuir, taper si la personne n’arrête pas.

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