Minable

harcelement de rue
http://www.radiovl.fr/harcelement-rue-nouveau-fleau-societe/

Vendredi, 15h30. Je rentre chez moi et en profite pour m’arrêter au petit supermarché du quartier pour faire quelques courses.

A cette heure, personne ou presque dans le magasin : moi, la caissière, une jeune femme accompagnée de son enfant de 4 ou 5 ans.

En caisse, je suis devant elle. Je sors mes courses, la caissière les passe, me donne le prix.
Je sors mon argent.

Tout d’un coup, un grognement : un jeune homme est entré dans le magasin et attends derrière la jeune maman pour passer, lui aussi, en caisse.

Seul homme dans le magasin, 3 femmes.

Me voyant le regarder, pendant que la caissière me rend ma monnaie, le voilà agressif :

–  «  Ouaich si c’est pour prendre 15 plombes à payer et faire chier tout le monde, faut pas venir ici hein ».

Je suis interloquée. Entre mon passage en caisse et mon rendu de monnaie, moins de 3 min. Je n’ai pas l’impression d’avoir pris tant de temps que ça.
Je le regarde donc dans les yeux, lui demandant s’il a un problème.

– « Non mais vas y, ferme ta gueule maintenant, ferme bien ta gueule ! ».

Sa réaction est tellement disproportionnée, je suis tellement en colère de ressentir de la peur que je deviens conne :

– « Non, je ne fermerai pas ma gueule »

Et me retournant vers la caissière, elle aussi effrayée :

– « Vous savez ce qu’on dit, hein, Grande gueule, P’tite bite. Faut bien qu’ils arrivent à compenser ».

Il est sous le choc. Tellement sur de sa supériorité sur les femmes, tellement sur de nous faire peur, il ne s’attendait pas à ça.
Comme il ne s’attendait pas aux rires, nerveux, de la caissière et de la jeune maman qui, toutes deux autant effrayées que moi, ne peuvent se retenir.

Il ne répondra rien, et partira, la « queue entre les jambes » et la tête basse.

Je regarde la jeune maman qui m’adresse ses félicitations.
La caissière, elle, est effrayée pour moi : « Vous voulez rester un peu ici pour être sûre qu’il ne vous attend pas dehors ? »

Non.

Je la remercie et lui répond que quelques minutes ne changeront rien s’il a décidé de se venger, qu’au pire, je porterais plainte et que j’aurais sa description grâce aux vidéo-surveillances du magasin.

Je sors, et prend le chemin de chez moi, guère rassurée malgré tout, et ne pousserait un soupir de soulagement qu’en fermant la porte.
Puis les tremblements : que m’a-t-il pris ? Pourquoi je n’ai pas ignoré ce jeune con et laissé couler ?

NON.

Parce que j’en ai assez d’avoir peur quand, dans la rue, des hommes sont derrière moi.
Assez de craindre leurs avances, leurs insultes.
Assez d’avoir l’impression d’être une proie, de n’être que tolérée sur l’espace public.

Alors, j’ai répondu. Tant pis pour les conséquences.
Tant pis si en faisant ça, j’ai aggravé la situation.
Je me suis senti tant puissante de ne pas le laisser « m’impressionner ».

A toi, qui te crois si fort de par ton sexe et ta force. Toi qui crois que les femmes sont des objets que tu peux traiter comme tu le souhaites, effrayer, bousculer, insulter.
Tu n’est qu’un con. Un branleur. Tu n’est pas fort, tu es faible. Tu est même plus faible que moi.
Tu est faible parce que tes façons de faire, je les vois comme ta peur de moi, du sexe dit faible et pourtant bien plus fort que toi.

Tu as peur de moi. Tu sais que tu ne me brisera pas.
Oh, tu m’effrayeras, oui. Tu me feras trembler, pleurer.
Tu peux hanter mes cauchemars.
Mais tu ne me brisera pas.

Je continuerais à m’habiller comme je veux. En jupe, en short
Je continuerais à sourire en marchant dans la rue.
Je continuerais à marcher la tête haute.
Je continuerais à marcher, à penser que la rue ne t’appartient pas.

Pauvre garçon. Tu me fais tellement pitié. Je suis triste pour toi….

Tu est minable. Seulement et tellement minable….

Je t’invite, lecteur, lectrice, à lire le très beau billet en image de Diglee sur le harcèlement de rue
Ainsi que celui de Cranemou, qui a engendré le hashtag #TaMereEnShort
Et à découvrir jusqu’où l’homme peut être minable ici.

 

10 commentaires sur “Minable”

  1. Je n’ai qu ´une chose à te dire :BRAVO ! Je n’aurais jamais eu la répartie que tu as eu. Si il existait beaucoup plus de femmes comme toi , peut être ces minables nous lâcheraient-ils … Ils se permettent d’être comme ça car ils savent que les femmes la fermeront par peur, par crainte des représailles . J’admire ton cran,d’autant plus que tu l’as touché dans sa virilité, en plein dans le mil !! Il s’est tellement senti désarçonné qu’il est parti. Tu lui as coupé le sifflet. Bises

    1. C’est difficile de ne pas se laisser impressionner, car souvent, ils sont plus costauds que nous, et il y a une culture de la soumission de la femme très forte.
      En général, j’aurais laissé faire et ignorer. Mais là, je sais pas pourquoi, c’est sorti tout seul

  2. J’aurais eu peur de la violence physique en réponse à ça, c’est sûr. Surtout avec l’enfant au milieu. Pourtant il faut bien résister, ça n’est pas acceptable (justement pour nos enfants, aussi).
    C’est “amusant” mais je n’avais pas pensé à ça comme une agressivité sexiste. Pourtant il est évident (oui, pas très futée la Banane parfois) qu’il ne se serait pas adressé de cette manière à un homme ou si tu avais été accompagnée d’un homme.
    Ppff, ça me déprime un peu, tout ça…

    1. Comme la maman n’a rien dit, son fils ne risquait pas grand chose. C’est plus moi que j’ai mis en danger et j’avoue qu’après, j’étais pas rassurée, m’attendant à me faire agresser physiquement dans la rue.
      Mais non. OUF !

Un petit mot doux ? N'hésitez pas !

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.