Bien caché derrière nos écrans, il est si facile de donner l’image que l’on souhaite à notre vie.
C’est, je crois, l’effet pervers d’internet et de ses réseaux sociaux.
On rêve devant les photos Instagram d’enfants heureux, d’intérieurs magnifiques, de voyages magiques.
On salive devant les idées magnifiques ou originales de Pinterest.
On envie la vie de rêve que vit apparemment l’autre et que l’on découvre à coup de statuts facebook ou de tweet.
Mais bien souvent, devant les images ou les statuts heureux, peuvent se cacher des réalités bien plus douloureuse ou difficile, des réalités qu’on n’imagine même pas une seconde.
J’en avais déjà parlé dans ce billet, qui faisait suite au billet de Ginie sur le même thème.
On fustige souvent les réseaux sociaux de ce faux « monde parfait » qu’ils véhiculent. Sans penser qu’ils est si facile de cacher sa souffrance même dans la vraie vie.
Dernièrement, un billet de Jaddo m’a interpellée. Elle y raconte, en gros, qu’elle avait pris en grippe quelques uns de ses patients qui avaient l’air de pas mal abuser. Jusqu’à ce qu’elle découvre leur vraie vie. (Je vous laisse aller lire son billet, édifiant et émouvant).
Personne n’aime renvoyer une image de faiblesse, de détresse. Et bien souvent, d’ailleurs, on niera votre souffrance, comme on le fait souvent face à ces jeunes mères en plein baby blues et à qui on répète « Mais tu as un bébé en parfaite santé, beau, tu as tout pour être heureuse ».
Certains iront jusqu’à dénigrer le droit d’être triste, malheureux ou en colère « De quoi elle se plaint, celle là ! Elle a un mari, des enfants en bonne santé, un toit sur la tête et de l’argent sur son compte ! ».
Mais qui sait que derrière cette image de famille parfaite, se cache peut être une femme battue, un enfant malade….
Je suis personnellement souvent choquée devant les témoignages consternés des amis et voisins qu’on peut entendre ou lire après un suicide ou une tentative « Mais je ne comprends pas, ils avaient l’air bien, elle souriait, était heureuse ! ».
L’image que l’on se fait des gens en ne prenant en compte que ce que l’on connaît, ou le peu qu’on sait d’eux est une belle saloperie, si on ne sait rester ouvert à ce qui n’est peut être pas dit, à ce qu’on ne voit pas.
Souvent, je soupire, un peu agacée, devant certaines questions ou statuts, devant certains billets. Je trouve les interrogations, les inquiétudes tellement dérisoires, tellement hors de propos.
Quand l’une s’inquiète pour son enfant fiévreux d’un petit 38° depuis quelques heures, j’ai parfois envie de répondre « Vas y, c’est bon, il ne va pas mourir, hein. Regarde cette autre maman qui vit avec le cancer elle ! »
Mais si ces réflexions passent à la vitesse de la lumière dans ma tête, je ne me permettrais jamais de les dire. Et même, je vais me fustiger d’avoir eu une telle pensée, et tout faire pour rassurer, conseiller la maman (ou papa) inquiète.
Parce que je pars du principe que nous n’avons pas tous le même vécu, la même sensibilité. Pour quelqu’un qui n’a jamais été malade, une petite intervention paraîtra particulièrement effrayante, alors que la même intervention paraîtra risible à une personne avec des soucis de santé….
Je déteste cette culture du « Toujours se montrer fort » qui culpabilise tant ceux qui ont quelques faiblesses, au point qu’ils se sentent obligés de les taire.
Moi même, je n’ose jamais dire quand ça ne va pas pour moi même. Dire que mes enfants sont casse-pieds, malades, pas de soucis. Mais en général, je tais mes propres problèmes, enterre mes propres faiblesses. Par peur du jugement, le plus souvent.
Dans les moments où je suis particulièrement tirée par le bas, je dévie le sujet en parlant de l’autre, en évitant les contacts, par exemple.
Peu de gens ont pris conscience de mon mal-être, dans mon entourage, il y a un an.
Ma famille n’en a d’ailleurs jamais eu conscience.
Depuis 3 mois, je consulte mon médecin pour des problèmes de fatigue. Je suis sans aucun tonus, toujours fatiguée, au point d’éviter les sorties. Quand je sors, avec ou sans amies, je trouve le temps long, et j’ai envie de rentrer chez moi, m’affaler dans mon canapé ou me rouler en boule dans mon lit.
J’ai cru à un Alzheimer précoce, pendant un moment : des difficultés énormes de concentration. Une mémoire qui flanche au point de ne plus me rappeler de trucs dit quelques minutes plus tôt si je ne les note pas. Des bleus et des bosses régulièrement suite à des chocs ou à des chutes quand mes jambes me lâchaient. Parfois des bleus dont je n’avais aucune idée de provenance.
Ce qui m’effrayait beaucoup, surtout, c’était mon impossibilité à trouver mes mots, au point d’appeler ma mère pour savoir comment dire les choses.
Le jour où je me suis décidée à consulter enfin un médecin, c’est suite à une « absence ». Je me rappelle bien de ma panique quand, arrivée en centre-ville, je ne me souvenais plus du tout de pourquoi j’y étais venue. Je savais que j’avais quelque chose à faire, mais impossible de me rappeler quoi. Et j’ai hésité pendant de longues, trop longues minutes, sur le chemin du retour.
Pas d’Alzheimer, mais un énorme déficit en fer qui m’a conduit à l’hôpital à deux reprises pour des perfusions de fer.
Par sécurité, des tests ont été fait, j’ai vu un neurologue et je dois refaire un test neurologique dans quelques mois. Mais elle a été rassurante.
Et de tout ça, peu de personnes sont au courant.
Mon médecin traitant n’a pris la mesure de ma peur, de mon problème que le jour où j’ai éclaté en sanglot dans son cabinet, effrayée d’être malade, de laisser mes enfants sans leur mère.
Et pourtant, les signaux d’alertes, que ce soit pour lui ou pour mes proches, ont été nombreux.
Mes absences, mes trous de mémoire, mes insomnies, mon teint pâle et brouillé.
Et pourtant, personne n’a pensé que ça pouvait « ne pas aller ».
Il est si difficile d’entendre, de comprendre les maux qui se cachent derrière les mots qu’on entend, l’image que donne l’autre.
Comme pour tout le monde, ma vie est loin de n’être que paillette, bonheur et amour.
Chaque jour m’apporte son lot de difficultés, d’interrogations, de peur.
Depuis quelques semaines, le spectre du burn-out revient, alors que je croyais, j’espérais en être enfin débarrassée.
Pourtant, je vais bien. Je souris, je ris, j’aide mes amis, m’occupe de mes enfants, continue à parler de la pluie et du beau temps ou à imaginer demain.
Alors, derrière cette façade « presque bonheur parfait », qui devinera ce qui se cache ?
Bonjour,
C’est tellement vrai ce que tu écris. C’est aussi ce que je pense au fond de moi.
Merci pour cet article.
Malgré les apparences, il se cache parfois des douleurs.
Bonne journée
Et pleins de courage
Bon courage à toi aussi <3
Votre billet est émouvant et pose une vraie question : faut-il toujours montrer une façade lisse et heureuse ? Peut-on laisser entrevoir aussi son mal-être ou sa souffrance ? Entrevoir… c’est probablement le mot, entr’ouvrir aussi… entr’ouvrir une fenêtre vers son intimité, sa vérité, même souffrante, mais ne pas la déverser à pleins seaux non plus, juste la laisser entrevoir lorsqu’on en ressent le besoin, afin que l’autre ait la possibilité de saisir ou non la perche tendue.
Très bonne journée à vous !
Oui, c’est vrai qu’on a tendance à ne montrer que le bon côté. Il faut dire qu’on est dans une société qui nous dit beaucoup qu’il faut être le plus fort, et où le moindre signe de faiblesse est utilisé. Quel dommage
Effectivement, il est parfois difficile de dire les choses aux personnes qui nous entourent. Paradoxalement je trouve plus facile de les dires sur les réseaux sociaux ou sur mon blog. Dans tous les cas je te souhaite un bon rétablissement. Et je ne manquerai pas de te suivre dans tes aventures.
Oui, j’ai remarqué ça aussi 😉
Merci <3
Je te comprend, j habite un village ou l on croit que le lien est facile ,les enfants etaient a la creche ensemble. Tout le monde fait semblant que tout va bien ,ce n est que facade. Il faut a tout prix se montrer heureux. Courage. J ai ecris sur un caillou a une amie la phrase suivante: croire en demain. Bises coco
C’est dommage parce que du coup, on juge sans savoir ni connaitre